La Cour de cassation a opéré un revirement jurisprudentiel en matière de prise en charge des maladies professionnelles. Dorénavant, il n’existe plus de présomption de responsabilité du dernier employeur concernant les risques auxquels le salarié peut être exposé. Depuis décembre 2022, il incombe à la Caisse d’assurance retraite et de santé au travail (Carsat) d’en apporter la preuve.
Le 1er décembre 2022, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rendu quatre arrêts relatifs aux maladies professionnelles. L’affaire commence avec le signalement fait par un employé d’une pathologie due à l’inhalation de fibres d’amiante. La CPMA considère cette pathologie comme une maladie professionnelle. Les débours sont ensuite attribués par la Carsat au compte AT/MP (accidents du travail/maladies professionnelles) de son dernier employeur. Mais l’entreprise réfute avoir exposé le collaborateur à des poussières d’asbeste. Elle demande à l’organisme de corriger cette erreur et de supprimer ces coûts de son compte. Les employeurs impliqués dans ces procès estiment que les dépenses doivent être inscrites sur le compte spécial.
La Carsat a la charge de la preuve
La société concernée par l’arrêt n°20-22.760 estime que l’employeur chez lequel la pathologie s’est formée a disparu. Celles qui sont mêlées aux autres décisions soutiennent quant à elles qu’il est impossible de déterminer celui-ci.
En réalité, la jurisprudence qui prévalait avant ce revirement de la Cour de cassation présumait que la maladie professionnelle était attrapée chez le dernier employeur. Il appartenait alors à ce dernier de prouver que cette pathologie était liée à l’environnement de travail d’une autre entreprise. Les décisions du 1er décembre 2022 apportent un changement significatif qui pourrait au passage impacter les mutuelles en portage salarial.
La preuve de l’exposition du salarié au risque chez la société en cause incombe désormais à la Carsat. Concernant la demande de l’employeur d’affecter les dépenses au compte spécial, les règles traditionnelles sont maintenues. L’employeur reste tenu de démontrer que les conditions pour cette inscription sont remplies :
- Incapacité d’établir dans quelle entreprise la pathologie s’est déclenchée ;
- Disparition de l’entreprise, etc.
Il faut donc déterminer l’endroit où la maladie a été attrapée et l’exposition au risque. S’agissant du premier élément, il porte sur le dernier employeur où le travailleur a été contracté la maladie. Sauf si l’entreprise prouve le contraire. Concernant le second point, il n’existe aucune présomption d’inscription au compte de la dernière entreprise pour laquelle le salarié a travaillé.
Comment s’effectue la tarification AT/MP ?
Dans la tarification AT/MP, la CPAM s’assure que la pathologie est bien une maladie professionnelle. Puis, elle en avise la Carsat. Cet organisme met alors les débours afférents à la charge de l’entreprise qui emploie le salarié concerné. Pour estimer son taux de cotisations AT/MP, il détermine ensuite si celui-ci est soumis à la tarification mixte ou individuelle. L’intéressé en est informé après cette étape.
La Carsat n’impute en revanche exceptionnellement pas certains coûts au compte d’un employeur défini. Ceux-ci sont inscrits sur un compte spécial, dans lequel tous les employeurs contribuent financièrement. Ceci à l’aide d’une majoration forfaitaire de la cotisation AT/MP.
Ces dépenses sont exhaustivement citées par un arrêté du 16 octobre 1995. Parmi elles se trouvent celles énumérées à l’article 2, 3° et 4°, liées respectivement à la maladie attrapée :
- Le collaborateur a été exposé au risque tour à tour chez des employeurs différents. Mais il n’est pas possible de déterminer dans quelle entreprise ce salarié a contracté la maladie ;
- L’entreprise où le collaborateur a contracté la pathologie a disparu.
L’entreprise a le droit de contester une décision de la Carsat devant un juge de la tarification. Elle peut également porter l’affaire devant la justice en cas de décision défavorable de la CPAM. Le juge du contentieux de la Sécurité sociale est compétent pour trancher dans cette affaire.
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